Nous avons tous des biais cognitifs dans notre quotidien qui peuvent nous éloigner de la pensée rationnelle. Et c’est également quelque chose auquel on est confronté dans notre métier d’ingénieur pédagogique et qui peut avoir un impact sur la manière dont on construit des parcours de formation.
Dans l’article du jour, je vais t’en partager trois.
Concepteur pédagogique: les 3 biais cognitifs à connaître
1 - L’effet de halo
Le principe de l’effet de halo est assez simple ! C’est un effet qui affecte notre perception des choses et plus précisément notre première impression.
Si une personne te fait une bonne première impression, tu auras tendance à interpréter les actions qui suivront, ainsi que son comportement, de façon positive.
Tu auras également plus tendance à lui associer d’autres qualités qu’elle n’a pas forcément.
Au contraire, si une personne te fait une mauvaise première impression, tu auras tendance à interpréter les actions qui suivront ainsi que son comportement de façon négative.
Heureusement, c’est quelque chose qui peut évoluer avec le temps ! Mais cela peut avoir un impact sur ton travail de concepteur pédagogique. Sans que tu le réalises, l’effet de halo peut changer ta manière de construire certains parcours de formation.
Tu peux avoir des a prioris sur de potentiels clients ou sur un public apprenant qui seront en grande partie liés à une première impression. Qu’elle soit positive ou négative. Le risque est alors de prendre des décisions basées sur des stéréotypes ou même de proposer des formations construites sur des préjugés.
Un exemple: un jour, je discutais avec quelqu’un sur les salariés du bâtiment. Il m’a dit qu’il s’agissait d’un public apprenant difficile, parce qu’incapable d’utiliser des appareils électroniques, un peu brut de décoffrage et qui n’a pas fait d’études. Et d’ailleurs, peut-être que tu penses la même chose ? Si c’est le cas, ce serait intéressant de te demander pourquoi ? À ton avis, à quoi est due cette pensée ?
Dans cet exemple, tu remarqueras que j’ai parlé des salariés du bâtiment et pas forcément des artisans. Pourtant, c’est peut-être le premier public qui t’est venu en tête. Mais en réalité, ce secteur réunit bien plus que des artisans. Et ce qui est vrai pour certaines entreprises ne sera pas forcément pour toutes… D’où l’importance de toujours prendre du recul et d’essayer de s’éloigner au maximum des idées préconçues et des stéréotypes qui nous viennent en tête en pensant à un type de métier. Et en tant que concepteur pédagogique, c’est même essentiel de s’en détacher pour réussir à produire un travail de qualité. Une personne qui ne prendrait pas de recul sur sa propre perception d’un métier l’utilisera sûrement dans la conception de ses formations. Et de fait, il y aura une forte incidence sur l’expérience apprenant.
2 - L’effet de l’ordre
On en entend parfois parler pour le domaine scolaire.
L’effet de l’ordre, c’est par exemple le fait que certains professeurs notent plus sévèrement les élèves en haut de la pile et sont plus souples avec les derniers. Mais l’effet de l’ordre peut également être appliqué à d’autres situations, notamment dans notre métier de concepteur pédagogique freelance. Ici, j’aimerais faire le lien avec une semaine de travail et la manière dont on répartit nos missions sur une semaine.
Si l’on s’est reposé le week-end, il est plus facile de débuter la semaine tout feu tout flamme. Sauf qu’au fil de la semaine, si l’on ne gère pas bien notre énergie, la fatigue va grandir, l’attention va baisser et la rigueur avec laquelle on avait débuté la semaine va s’amenuiser. Et je parle en connaissance de cause, c’était mon cas quand je me suis lancée en freelance.
Pourtant, en tant que freelance, on a cette chance de pouvoir maitriser notre emploi du temps.
On la possibilité de mieux gérer notre énergie en plaçant les tâches intellectuelles sur les jours ou les heures qui nous conviennent le mieux. Alors, si tu as cette possibilité, n’hésite pas à le faire ! Tu verras une nette amélioration dans ton efficacité quotidienne !
Un exemple: la conception me prend pas mal de jus de cerveau alors j’essaie de ne pas programmer cette tâche en fin de semaine. Bien sûr, si tu fais que de la conception, tu n’auras pas le choix et cette dernière prendra beaucoup de place dans ton emploi du temps. Cependant, si tu as d’autres tâches complémentaires qui s’ajoutent, ce serait intéressant de les placer à des moments où ton énergie est plus basse et de privilégier les moments où tu as de l’énergie pour concevoir tes parcours de formation.
3 - Notre personnalité
Notre personnalité, nos valeurs personnelles et professionnelles auront également un impact fort sur notre manière de percevoir les choses. Et de fait, cela pourra avoir un impact dans la conception de nos parcours de formation, sans même qu’on le réalise.
On peut être confronté au biais d’attention. C’est à dire que nos perceptions seront influencées par nos propres intérêts. C’est d’ailleurs pour cette raison que je recommande aux personnes que je coache de travailler sur des sujets qui les intéressent. Leur manière de construire le parcours de formation sera impactée de manière positive. Alors qu’au contraire, si l’on travaille sur un sujet qui nous ennuie profondément, ce sera parfois plus compliqué. On pourra avoir tendance à éliminer certains éléments, car on n’en verra pas la pertinence, notamment par manque d’intérêt. Comme pour les autres biais cités dans cet article, c’est parfois très inconscient.
Il existe un autre biais lié à notre personnalité: le biais d’immunité à l’erreur. C’est le fait de ne pas voir ses erreurs et de ne pas prendre la responsabilité de celles-ci. Dans notre métier, il se manifeste par une absence de remise en question: on peut être persuadé de faire les bons choix et de voir nos lacunes comme anodines. C’est important de connaitre ce biais pour garder un esprit objectif et du recul dans la conception de nos parcours de formation.
Et enfin, j’avais également envie d’abord le principe de dissonance cognitive. C’est le fait de ne pas voir certaines réalités pour ne pas remettre en cause des croyances ou des pratiques solidement ancrées en nous.
D’ailleurs, j’ai observé deux types de personnalités bien distinctes. D’un côté, on retrouve les ingénieurs pédagogiques qui considèrent qu’ils savent, qu’ils détiennent une sorte de vérité. Et de l’autre, il y a ceux qui se remettent constamment en question (eux-mêmes, ainsi que leurs pratiques), qui sont ouverts d’esprit et prêts à casser ce qu’ils ont appris pour créer de nouvelles approches.
Bien sûr, il existe d’autres biais qui sont liés à notre personnalité, mais mon but n’est pas de tous les lister ici. Je voulais te partager ceux qui me semblent les plus fréquents.
L’opinion des autres comme biais cognitif en digital learning ?
Ici, je ne sais pas si l’on peut parler de biais cognitifs au sens littéral du terme. Cependant, c’est un point qui fait sens avec le sujet de l’article: la perception de nos clients ou de nos collègues peut avoir un impact fort sur la conception de nos parcours de formation.
C’est d’ailleurs un point que je trouve difficile à gérer. En tant que freelance, la satisfaction de nos clients prime souvent. En effet, c’est le client qui paie et qui investit dans un concepteur pédagogique. Cependant, l’objectif final est de créer un parcours de formation optimal pour l’apprenant. Mais parfois, le client ne prendra pas autant à cœur l’expérience apprenant que toi…
Et là, ce n’est pas forcément évident.
Un jeu d’équilibriste pourra s’opérer pour réussir à satisfaire le client, tout en mettant en priorité l’expérience client. D’ailleurs, on peut même ajouter dans l’équation l’expert métier. C’est important de réaliser que le client peut parfois nous influencer et avoir un impact sur les parcours de formation. Mais encore une fois, l’essentiel est de se rendre compte de cette influence pour garder le maximum de recul dans notre métier au quotidien.
Comment effacer nos biais cognitifs en tant que concepteur pédagogique ?
Et bien, je vais sûrement te décevoir, mais on ne peut pas les effacer ! Tout simplement parce qu’ils sont de l’ordre de l’inconscient. Cependant, on peut les identifier et en tenir compte dans notre quotidien. La première étape, c’est tout simplement de les connaître et de prendre conscience de leur impact sur notre travail. Ensuite, c’est essentiel selon moi de toujours garder l’esprit ouvert et ne jamais se dire que l’on détient la vérité.
Mais il ne faut pas pour autant s’autoflageller et se limiter par peur d’être influencé par un biais cognitif. C’est aussi en travaillant et en développant une certaine expérience que l’on réussit à les intégrer dans notre réflexion.
Par exemple, un jour, j’ai débuté un projet où j’avais en tête que tout le monde voyait. C’est idiot puisque je sais que tout le monde ne voit pas… Mais le fait d’avoir uniquement travaillé sur des projets où le public voyait m’a poussée à penser que ce serait toujours le cas. Une fois que je l’ai réalisé, j’ai adapté mon travail et cela m’a permis de ne plus refaire cette même erreur par la suite.
Quelles solutions pour réduire l’impact des biais cognitifs sur notre travail de concepteur pédagogique ?
Si l’on ne peut pas les effacer, on peut quand même travailler dessus ! Et pour ça, je vais te partager quelques solutions.
La première c’est de travailler en équipe et de brainstormer avec plusieurs personnes pour inclure différents points de vue et réduire l’influence de nos biais cognitifs respectifs. Tu peux également t’associer à d’autres métiers ou faire appel à des personnes aux compétences complémentaires pour maximiser les chances de faire passer ton message de la façon la plus efficace possible.
Une autre solution, c’est d’aller au contact direct des apprenants. Vas-y l’esprit curieux et ouvert et prends le maximum d’informations pour les comprendre et les connaitre le mieux possible. C’est la meilleure manière d’éloigner les stéréotypes, qui naissent parfois de la distance que l’on peut avoir avec un sujet ou un domaine d’activité.
Si tu sens que ton client ou le commanditaire freine cette partie, n’hésite pas à l’éduquer sur l’importance de répondre aux besoins des apprenants et l’impact que cela aura en termes de résultats.
On n’aura jamais de solution d’apprentissage parfaite mais on aura fait de notre mieux pour les apprenants.
J’en profite pour te dire bravo à toi qui as décidé d’œuvrer à rendre l’apprentissage accessible à tous et suis heureuse d’y contribuer à tes côtés, qu’on se connaisse déjà ou pas encore !
Si tu as aimé cet article ou si tu as des questions, je te propose de me contacter sur LinkedIn, c’est toujours un plaisir d’échanger.
Cet article de blog est issu d’un épisode de podcast dédié aux biais cognitifs en tant que concepteur pédagogique. Pour l’écouter, il suffit de cliquer ci dessous: